Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/422

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dre de moi pour la générosité qu’il m’a montrée, que des égards s’il devient notre prisonnier. Ce que je vous demande, capitaine Bignall, c’est le temps nécessaire pour mettre le Dard en état de soutenir un combat qui nécessitera l’emploi de toutes ses forces, et pour assurer une victoire qui sera chèrement vendue.

— Mais s’il nous échappait ?…

— Je vous réponds qu’il ne l’essaiera pas. Non-seulement je connais l’homme, mais je sais combien ses moyens de résistance sont formidables. Une petite demi-heure suffira pour nous préparer à l’attaque, et ce délaine sera un objet de reproche ni pour notre courage ni pour notre prudence.

Le vétéran donna son consentement avec une sorte de regret, et non sans murmurer quelques mots sur la honte à laquelle s’exposait un vaisseau de guerre anglais en ne se présentant pas sur-le-champ bord à bord du plus hardi pirate qui fût sur la surface des mers, et en ne le faisant pas sauter en l’air par une seule bordée. Wilder, qui était accoutumé aux honnêtes bravades de profession qui servaient souvent d’accompagnement au courage réellement ferme et mâle des marins de ce siècle, le laissa se plaindre tant qu’il le voulut, et s’occupa des soins qu’il savait être de la plus grande importance, et des devoirs dont il était plus spécialement chargé, attendu le grade qu’il occupait.

L’ordre de se préparer au combat fut donné à l’équipage, et cet ordre fut reçu avec cette ardeur empressée que montrent les marins lorsque quelque changement important a lieu dans leur profession. Du reste, il y avait peu de chose à faire, car la plupart des arrangemens préalables avaient été laissés dans le même état que lors de la première rencontre des deux vaisseaux. Après que toutes ces dispositions eurent été prises, que les canonniers eurent été placés près de leurs pièces d’artillerie, les officiers à leurs batteries respectives, et les matelots chargés des voiles sur les bras, le navire fut remis en mouvement.

Pendant ce court intervalle, le vaisseau du Corsaire était à la distance d’un demi-mille, dans un état de repos complet, ne paraissant faire aucune attention aux dispositions hostiles du croiseur royal. Quand pourtant on vit le Dard céder à la brise et augmenter graduellement la vitesse de sa marche, son brion, en fendant les ondes, soulevant de petites vagues d’écume, la proue du Dauphin s’écarta de la direction du vent, sa voile de hune fut déployée, et il se mit à son tour en marche. Le Dard arbora