Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/97

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ment de l’assurance, à mesure que la vue du tiroir avait opéré sur ses sens :

— Et que dois-je faire, haut et puissant marin, pour avoir part à ces richesses ?

— Ce que vous faites tous les jours sur la terre, — couper, bâtir et coudre. Peut-être pourra-t-on essayer de temps en temps vos talens pour quelques costumes de fantaisie ou de mascarade.

— Ah ! ce sont des inventions perfides et diaboliques de l’ennemi, pour entraîner les hommes dans le péché et dans les abominations mondaines ! Mais, digne commandant, je pense à Désirée, ma femme inconsolable ; quoique vieille et assez difficile à vivre, cependant c’est la compagne légitime de mon cœur et la mère d’une nombreuse famille.

— Elle ne manquera de rien. Nous avons ouvert ici un asile pour les maris en détresse ; ceux qui n’ont pas assez de force pour être les maîtres chez eux, viennent ici comme dans un lieu de refuge. Nous pourvoyons aux besoins de leurs familles par des moyens qui nous sont connus, et tout le monde est content. Ce n’est pas le moindre de mes actes de charité.

— C’est une conduite juste et méritoire, honorable capitaine, et j’espère que Désirée et ses enfans ne seront pas oubliés. Assurément l’artisan mérite son salaire, et si je travaille pour vous, forcé et contraint, j’espère que la bonne femme et ses petits ressentiront les effets de votre libéralité.

— Vous avez ma parole ; on aura soin d’eux.

— Peut-être, équitable gentilhomme, si quelque avance était faite sur ces fonds immenses que je vois rassemblés, l’esprit de ma pauvre moitié serait singulièrement tranquillisé, et ses recherches pour savoir ce que je suis devenu seraient infiniment moins actives. Je connais parfaitement le caractère de Désirée ; j’ai d’excellentes raisons pour cela, et je suis identiquement convaincu que, tant qu’elle aura la misère en perspective, elle jettera les hauts cris dans Newport. Maintenant que le Seigneur a bien voulu m’accorder un répit, il ne peut y avoir de mal à désirer en jouir en paix.

Quoique le Corsaire fût loin de croire, comme son prisonnier, que la langue de Désirée pût troubler l’harmonie de son vaisseau, il était dans un jour d’indulgence. Poussant de nouveau le ressort, il prit une poignée d’or, et la présentant à Homespun, il lui dit :

— Voulez-vous vous engager et prêter le serment d’usage ? aussitôt cet argent est à vous.