Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/256

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— En ce cas, il peut s’épargner beaucoup de peine et de fatigue, à moins qu’il ne trouve un grand plaisir à voyager à cheval ; car je ne connais pas un jeune homme qui me plaise moins dans toute la colonie du Connecticut. D’autres peuvent trouver en lui des choses à louer, mais, pour moi, il me semble hardi dans ses discours, gauche dans toute sa tournure et désagréable dans sa conversation.

— Je suis charmée que nous nous trouvions enfin du même avis ; car tout ce que tu viens de dire de ce jeune homme, il y a longtemps que je le pense aussi.

— Toi ! tu penses ainsi de ce galant ? et pourquoi donc l’écoutes-tu ? Je te croyais une fille trop franche, Marthe, pour vouloir ruser ainsi. Avec cette opinion de son caractère, pourquoi reçois-tu ses soins ?

— Une jeune fille doit-elle parler inconsidérément ?

— Et s’il était ici, et qu’il te demandât de l’épouser, ta réponse serait… ?

— Non, s’écria Marthe en levant les yeux un instant ; mais rencontrant ceux de Mark qui semblaient étinceler, elle les baissa sur-le-champ, quoiqu’elle eût prononcé ce monosyllabe avec fermeté.

Mark parut un instant comme égaré ; une nouvelle idée s’empara de son esprit. Le changement qui s’opérait en lui se faisait voir par son air joyeux et la couleur de ses joues. Ceux de nos lecteurs qui ont passé quinze ans peuvent deviner ce qu’il était sur le point de dire ; mais dans ce moment on entendit la voix de ceux qui avaient accompagné Whittal au fort ruiné et qui en revenaient avec lui ; et Marthe disparut à si petit bruit, qu’il fut un instant sans s’apercevoir de son absence.