Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/62

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leur dessein. Même à cinquante pas de cet objet, quoique la lune en son plein projetât ses brillants rayons sur la terre, on ne pouvait encore se livrer à aucune conjecture. L’un affirmait que c’était une vieille souche comme il en existait une grande quantité dans les champs, l’autre que c’était un animal rampant des forêts. Deux fois Content leva son fusil pour faire feu, et deux fois il le laissa retomber, éprouvant de la répugnance à détruire même un quadrupède dont il ignorait la nature. Il est plus que probable que son compagnon, moins scrupuleux, eût décidé la question peu de temps après avoir quitté la poterne, si la balle particulière que contenait son fusil ne l’eût rendu plus délicat sur l’usage qu’il pouvait en faire.

— Fais attention à tes armes, dit le premier en tirant son couteau de chasse. Nous allons nous approcher et rendre certain ce qui est encore douteux.

Ils approchèrent ; Dudley poussa rudement avec son fusil l’objet en question, qui ne donna d’abord aucun signe de mouvement ou de vie. Cependant, comme si une plus longue feinte était inutile, un jeune Indien d’environ quinze ans se leva tout d’un coup d’un air résolu, et se plaça devant ses ennemis avec la sombre dignité d’un guerrier vaincu. Content saisit promptement le jeune Indien par un bras ; et, suivi d’Ében, qui de temps en temps hâtait la marche du prisonnier avec la crosse de son fusil, ils retournèrent précipitamment derrière la barrière.

— Je parie ma vie contre celle de Straight-Horns, qui n’est pas d’une grande valeur maintenant, dit Dudley en fermant le dernier verrou de la poterne, que nous n’entendrons pas parler cette nuit des compagnons de cette Peau Rouge. Je n’ai jamais vu un Indien lever la tête lorsqu’une de ses sentinelles avancées est tombée entre les mains de l’ennemi.

— Cela peut être, répondit Content, mais une maison où chacun dort doit être gardée. Nous pouvons compter sur la faveur spéciale de la Providence ; elle aidera les moyens employés par notre prudence, jusqu’au lever du soleil.

Content était un homme qui parlait peu, mais d’un grand calme et d’une grande résolution au moment du danger. Il savait parfaitement qu’un jeune Indien comme celui qu’il avait fait prisonnier n’aurait pas été trouvé en ce lieu dans la position qu’il avait prise, sans un projet assez important pour justifier tout ce qu’il hasardait. L’âge tendre du captif empêchait aussi de se livrer