Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/88

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adresse particulière par laquelle les Indiens de l’Amérique du nord sont si remarquables, celle de découvrir les traces imprimées sur le sol des forêts, avec une intelligence qui ressemble presque à de l’instinct. Les craintes de la famille furent donc en partie apaisées par le rapport de ceux qui venaient de visiter les bois ; tous s’accordèrent à dire qu’aucun bande de sauvages assez forte pour être dangereuse n’était cachée dans les environs de la vallée, et quelques-uns, parmi lesquels se trouvait le vigoureux Ében Dudley, offrirent hardiment de répondre sur leur propre vie de ceux dont la sûreté était confiée à leur vigilance.

Ces paroles consolantes calmèrent un peu les craintes de Ruth et celles de ses servantes ; mais elles ne produisirent pas le même effet sur les quatre étrangers qui attristaient toujours Wish-ton-Wish de leur présence. Quoiqu’ils eussent renoncé à tout soupçon relatif au but de leur visite, ils ne parlèrent pas de départ. Au contraire, lorsque la nuit approcha, le chef entra en communication avec le vieux capitaine, et lui fit des propositions auxquelles le Puritain ne vit aucune raison de s’opposer.

Des sentinelles furent donc placées aux palissades jusqu’au lendemain matin, et les différents membres de sa famille se retirèrent dans leurs chambres à coucher, tranquilles en apparence sinon entièrement rassurés. Les étrangers, à leur grande satisfaction, prirent poste dans la plus basse des chambres fortifiés de la citadelle, et les heures de la nuit s’écoulèrent dans la plus grande tranquillité. L’aurore se leva dans la vallée solitaire, et n’éclaira, comme de coutume, que des scènes de calme et de paix.

Le soleil se coucha et se leva trois fois sur l’habitation de Wish-ton-Wish sans amener aucun sujet de danger ou d’alarme. Le temps rendit aux agents du roi Charles leur ancienne tranquillité ; cependant ils ne manquaient jamais de se mettre sous la protection de la forteresse lorsque les ténèbres commençaient à couvrir la terre. Hallam observa plusieurs fois avec gravité que leurs habitudes militaires et leur discipline les rendaient plus propres que d’autres à défendre la citadelle. Bien que le Puritain éprouvât un grand mécontentement du séjour des étrangers dans la vallée, habitude de l’abnégation et l’empire qu’il avait sur lui-même lui donnaient les moyens de cacher son dégoût. Pendant les deux premiers jours la conduite des étrangers fut irréprochable ; toutes leurs facultés semblaient être concentrées dans leur vigilance et la crainte que leur inspirait la forêt, d’où ils