Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t1, 1885.djvu/213

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Et le petit garçon qu’elle tient par la main
A déjà dans ses yeux agrandis par les jeûnes
L’air grave des enfants qui s’étonnent trop jeunes.

Ils marchent, regardant le coucher du soleil.

Mais voici que, parmi le triomphe vermeil
Des nuages de pourpre aux franges d’écarlate,
Là-bas, soudaine et fière, une fanfare éclate ;
Et, poussant devant eux clairons et timbaliers,
Apparaissent au loin les premiers cavaliers
D’un pompeux régiment qui vient de la parade.
Des escadrons ! mais c’est comme une mascarade.
Les enfants et le peuple, hélas ! enfant aussi,
S’arrêtent en chemin pour les voir. Or ceux-ci
Sont très beaux ; et le fils de la veuve regarde.
Lui qui vécut dans les murs froids d’une mansarde,
Il n’a jamais rien vu de tel. Il est hagard ;
Et sa mère lui dit, bénissant ce hasard,
Et distraite, elle aussi, de ses rêves austères :

« Restons là. Nous verrons passer les militaires. »

Ils s’arrêtent tous deux ; et le beau régiment,
Sombre et pesant d’orgueil, défile fièrement.