Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t1, 1885.djvu/86

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Or, pendant tout ce temps de travail, les aïeules
Au village, devant les portes, restent seules,
Se chauffant au soleil et branlant le menton,
Calmes et les deux mains jointes sur leur bâton ;
Car les travaux des champs leur ont courbé la taille.
Avec leur long fichu peint de quelque bataille,
Leur jupe de futaine et leur grand bonnet blanc,
Elles restent ainsi tout le jour sur un banc,
Heureuses, sans penser peut-être et sans rien dire,
Adressant un béat et mystique sourire
Au clair soleil qui dore au loin le vieux clocher
Et mûrit les épis que leurs fils vont faucher.

Ah ! c’est la saison douce et chère aux bonnes vieilles !
Les histoires autour du feu, les longues veilles
Ne leur conviennent plus. Leur vieux mari, l’aïeul,
Est mort, et, quand on est très-vieux, on est tout seul :
La fille est au lavoir, le gendre est à sa vigne.
On vous laisse ; et pourtant encore on se résigne,
S’il fait un beau soleil aux rayons réchauffants.

Elles aimaient naguère à bercer les enfants.
Le cœur des vieilles gens, surtout à la campagne,
Bat lentement et très-volontiers s’accompagne
Du mouvement rythmique et calme des berceaux.
Mais les petits sont grands aujourd’hui ; ces oiseaux