Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/131

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Mais un quart d’heure après avoir bouclé l’agrafe,
Il pouvait, à travers les fils du télégraphe,
D’où les petits oiseaux s’envolaient ayant peur,
Le front hors du wagon qu’emportait la vapeur
Et les cheveux livrés au vent qui les fouette,
Voir de Paris décroître au loin la silhouette,
Et, semés de murs gris et de blanches maisons,
Verdoyer au soleil les vastes horizons.

L’express courut avec la vitesse d’usage,
Pour s’arrêter enfin dans un frais paysage
Où l’heureux voyageur, ivre d’émotion,
Reconnut, attendant devant la station,
Au milieu des enfants qui demandaient l’aumône,
La vieille diligence, et, sur la caisse jaune,
Put lire, écrit en noir, le nom de son pays.
Il jeta sa monnaie aux gamins ébahis,
Chercha le conducteur et lui paya la goutte.
Lestement, et pour voir de plus loin sur la route,
Il grimpa sous la bâche, au milieu des paquets,
Et s’assit en donnant leurs anciens sobriquets
Aux trois chevaux poussifs, plus maigres que nature,
Qui devaient tout à l’heure enlever la voiture.
« Hue ! en route, la Grise ! » Et le brave cocher
Qui nomme, en le montrant du fouet, chaque clocher