Olivier se revit dans l’étroite coulisse
Sentant la cave humide et la poudre de riz,
Où les comédiens, aux visages flétris,
Derrière le portant tout placardé d’affiches,
En attendant leur tour, rajustent leurs postiches.
Il suivit les détours compliqués du couloir,
Il entra dans la loge où, devant le miroir,
Traînent le pot de fard et la patte de lièvre ;
Et, sous le gaz qui siffle et qui donne la fièvre,
Il reconnut, debout dans le rayon blafard,
L’actrice, les seins nus et belle sous son fard,
Qu’ajuste d’une main empressée et que touche
L’habilleuse avec des épingles dans la bouche.
Il eut comme un dégoût de ces jours anciens
Où, chaque soir, assis près des musiciens,
Il écoutait jouer la même comédie.
Il revit en un mot cette folle étourdie
Qui riait aux éclats et vivait sans soucis
Dans le luxe indigent de ses meubles saisis,
Mêlait dans un tiroir les protêts et les rôles,
Au théâtre embrassait et tutoyait des drôles,
Engageait pour souper quelque parure en or,
Et qui l’avait enfin quitté pour un ténor.
La vision s’enfuit ainsi qu’un éclair brille.
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