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Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/228

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Et moins Thécla semblait avoir l’âme alarmée ;
Elle était sans terreur, comme un ancien martyr ;
Et, quand un paysan vint, un soir, l’avertir
Que des troupes sonnant une marche guerrière
Venaient par le chemin qui longeait la rivière,
L’abbesse fît ouvrir, contre tous les avis,
La grande porte et fit baisser le pont-levis.
Puis elle conduisit ses sœurs et ses novices
Dans le chœur, éclairé comme pour les offices,
Et leur fit réciter les prières des morts.

Sur un bai-brun rétif et qui blanchit le mors,
Voici Procope. Il vient dans un bruit de fanfare ;
Et sur le ciel sanglant derrière lui s’effare
Le sombre gonfanon des Frères de Tabor,
Sur lequel est brodé le grand calice d’or.
Les routes du vallon sont toutes occupées
Par un fourmillement de lances et d’épées ;
Et huit bœufs, balayant la terre du fanon,
Traînent auprès du chef un énorme canon
Autour duquel s’enroule une guivre de bronze,
Lourde pièce fondue en mil quatre cent onze
Par Ali, le sorcier de Prague, et dont le son
Était si foudroyant qu’il donnait le frisson
Aux plus vieux batailleurs jusqu’au fond de leurs chausses