Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/284

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Quand je fus consolé par un ami sincère.
Dieu — nous y croyons tous ; en mer, il le faut bien ! —
Chez ces hommes méchants avait mis un bon chien.
Traité comme moi-même, il vivait dans les transes,
Et nous fûmes bientôt de vieilles connaissances.
C’était un terre-neuve, et Black était son nom ;
Noir, avec des yeux d’or ; et ce doux compagnon,
Dès lors ne me quitta guère plus que mon ombre.
Et par les belles nuits aux étoiles sans nombre,
Quand il ne restait plus que les hommes de quart,
Accroupi sur le pont avec Black à l’écart,
Dans un recoin formé d’une demi-douzaine
De ballots arrimés près du mât de misaine,
Et mes deux bras passés au cou du brave chien,
Je déchargeais mon cœur en pleurant près du sien.
Oui, je pleurais, bercé par le bateau qui tangue,
Tandis qu’il me léchait avec sa grosse langue.

Mon pauvre Black ! Allez ! je songe à lui souvent.

Nous avions eu d’abord bonne mer et bon vent ;
Mais, un jour qu’il faisait une chaleur atroce,
Notre vieux capitaine — une bête féroce,
C’est vrai, mais bon marin, on ne peut le nier ! —
Fit une étrange moue et dit au timonier :