Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/299

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IV

Le blessé, soulagé d’avoir fait cet aveu,
S’est assoupi. Le sein palpitant, l’œil en feu,
Irène, près de lui, reste debout, sans larmes.

Oui, son amant est mort. Ce sont bien là ses armes,
C’est bien là son blason aussi fameux qu’ancien,
Et le sang qui noircit ce bijou, c’est le sien !
Ce n’est pas d’une mort héroïque et guerrière
Qu’a succombé Roger, mais frappé par derrière,
Sans pouvoir appeler ses amis, sans crier ;
Et cet homme qui dort là, c’est son meurtrier !
C’est bien son meurtrier ; il s’est vanté de l’être,
D’avoir frappé Roger dans le dos, comme un traître ;
Et maintenant il dort son lourd sommeil épais,
Et c’est à lui qu’Irène a dit : « Dormez en paix ! »
Et, comme une suprême et cruelle ironie,
Elle doit de ce front écarter l’agonie,
Rester à ce chevet jusqu’au soleil levant,
Comme une bonne mère auprès de son enfant :
Elle doit lui verser, de quart d’heure en quart d’heure,