Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t3, 1888.djvu/16

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Les révolutions rendent un peu sceptique ;
Mais, par vieille habitude et besoin machinal,
Je parcours volontiers, tous les soirs, un journal,
Pour savoir si l’on va changer ou non de maître,
Comme avant de sortir on voit le baromètre.

— « Demandez les journaux… le Temps… le Moniteur

Et, prenant le paquet tout frais, que le porteur
Lui jetait, en courant, dans sa pauvre boutique,
La bonne femme, active à servir la pratique,
Derrière un vasistas ouvert sur le trottoir
Se démenait, cherchait des sous dans son tiroir,
Et vendait, d’une humeur absolument égale,
Papier conservateur ou feuille radicale ;
— Et, lorsque je prenais un journal, au hasard :

— « Ah ! vous voilà, monsieur ! Vous arrivez bien tard ; —
Disait-elle gaiement. — Voyez ! ma vente est faite.
Je n’ai plus qu’un Pays et que deux Estafette
Et c’est toujours ainsi, lorsque les députés,
Comme ils ont fait hier, se sont bien disputés,
Et quand on dit qu’on va changer le ministère. »

Quelquefois, je causais, auprès de l’éventaire,