Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t1, 1892.djvu/22

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cieuse du fleuve et de la statue de Henri IV, dans l’admirable cadre formé par l’angle de la Cité et par les maisons du quai des Augustins, la ligne harmonieuse et lointaine des palais du Louvre. De toutes parts montaient jusqu’à lui, doublés par la sonorité de la rivière, les mille bruits joyeux de la ville en éveil, les soupirs haletants des bateaux à vapeur, le roulement des omnibus et des voitures, les cris des marchands des quatre saisons et les fanfares des pelotons de la garde montante. Il pouvait s’enivrer longuement de cette vie intense, de ce mouvement éblouissant, de ces magiques échos, et respirer à pleins poumons l’air libre et pur de ce vaste ciel rempli d’hirondelles.

Gabriel Fontaine était fait pour jouir de ces grandioses sensations, bien que la vie qu’il eût menée jusqu’alors ne semblât pas de nature à les développer en lui.

Au moment où commence ce récit, c’était un jeune homme de vingt ans à peine, de taille moyenne, de complexion délicate, toujours boutonné dans ses vêtements de deuil. Il avait les attaches fines, d’abondants cheveux châtains et ondulés, et de grands yeux bruns, à la fois passionnés et timides. Son visage, d’une pâleur mate et