Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t3, 1890.djvu/142

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oh ! pas de cognac, plus jamais de cognac, hélas ! — nous tisonnons les souvenirs de jeunesse.

Henri me rappelle alors nos timides amours de rhétoriciens pour cette jolie pâtissière de la rue Soufflot, et les indigestions d’éclairs et de babas que nous nous donnions afin de la contempler pendant un quart d’heure. Moi, je lui remets en mémoire notre fameuse partie carrée à la foire de Saint-Cloud. Nous étions allés là, lui en uniforme de polytechnicien, moi tout fier de mon premier chapeau gris d’étudiant qui suit la mode, et nous accompagnions deux folâtres modistes en robes d’été, des robes voyantes comme des affiches. Tout marcha d’abord à merveille. Une cartomancienne fit le grand jeu à ces demoiselles et leur annonça qu’un brun — c’était Dulac — et qu’un blond — c’était moi-même — étaient remplis des intentions les plus sérieuses à leur endroit. Au tir à la carabine, les deux jeunes personnes décapitèrent un grand nombre de pipes, et la grande Mathilde, celle qui m’intéressait plus particulièrement, eut même la bonne fortune de pulvériser la coquille d’œuf dansant au sommet du jet d’eau. Mais tout se gâta quand nous fûmes sur les chevaux de bois. Car nous y montâmes, nous eûmes l’imprudence