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Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t3, 1890.djvu/38

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C’était un certificat de libération délivré au nommé Dubois (Jules-Mathieu), caporal clairon à la 2e compagnie du 3e bataillon.

Ainsi, il allait voler un homme de son ancien régiment. Pas de son temps, non ! La date du papier était récente. Mais n’importe !

Et voilà que, le cœur remué, il hésite maintenant à faire le coup.

— « Comme on est bête ! » dit-il à demi-voix.

Soudain, son regard se reporte vers la table, où sont la miche et le tabac, et son parti est bien vite pris, au pauvre diable. Il coupe la miche par moitié, tire sa pipe de sa poche et la bourre, — on peut emprunter cela à un camarade, pas vrai ? — puis, s’élançant hors de la maison, il reprend, en mangeant son pain, le sentier à travers les blés, le chemin de traverse, la grand’route ; et quand il passe de nouveau, sa pipe allumée, devant le Christ du carrefour, il lui dit, sans le saluer, avec une grimace gaie au coin de la lèvre, où rit un reste de la blague du soldat d’Afrique :

« Toi, mon vieux, c’est dommage que tu n’aies pas servi au 75e !... Sans cela, tu me ferais trouver du travail, ce soir, à l’étape. »