Page:Coppée - Discours de réception, 1884.djvu/50

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d’un sécateur qui lui sort à moitié de la poche, se penche sur un rosier pour le débarrasser d’une chenille ou d’un colimaçon. Sa femme tricote à l’ombre d’un bosquet. Par la porte entr’ouverte on aperçoit un salon meublé à l’ancienne mode :

Une pendule avec Napoléon dessus,
Et des têtes de sphinx à tous les bras de chaise.

Dans cette demeure, tout est patriarcal, on y a le culte des traditions :

 
Ils mettent de côté la bûche de Noël,
Ils songent à l’avance aux lessives futures.....

— Mais ne souriez pas ! ajoutez-vous. Chez eux, tout est vieux, sauf le cœur, et ils savourent les douces voluptés que procurent les douces habitudes.

 
Chaque dimanche, ils ont leur fille avec leur gendre ;
Le jardinet s’emplit du rire des enfants,
Et, bien que les après-midi soient étouffants,
L’on puise et l’on arrose, et la journée est courte.
Puis, quand le pâtissier survient avec la tourte,
On s’attable au jardin, déjà moins échauffé,
Et la lune se lève au moment du café.

Que nous les connaissons bien ! et que vous avez le don de voir et de faire voir !

Les humbles vous sont chers, et ils vous ont fourni le titre d’un de vos recueils. Personne n’a su montrer mieux que vous tout ce qu’il peut tenir d’événements, d’émotions, de grandes espérances et de grandes déconvenues dans une petite et obscure destinée. Un de mes amis, savant docteur en esthétique, qui se piquait de ne goûter que la poésie à turban et à cothurne,