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histoire.

sence des prêches du désert et de la dissimulation de leurs proches, apprenaient au plus à se conduire avec la même prudence, sans être plus catholiques.

Personne d’ailleurs ne voulait s’exposer au mépris général par une apostasie sérieuse. Ceux même que la crainte de l’édit avait égarés un moment étaient bientôt contraints par pudeur, si ce n’était par zèle, à se rallier plus étroitement à la tribu proscrite, tandis que les bons catholiques autant que les bons protestants s’indignaient de ces sacrilèges complaisances, dont la législation devait supporter tout l’odieux. Aussi plus tard, les prêtres se fatiguèrent du rôle de marieurs et de baptiseurs d’hérétiques qu’ils connaissaient pour tels. L’édit de 1724 finit par devenir inexécutable, de quelque côté qu’on voulût s’y prendre pour l’appliquer, et quoique le clergé comme la magistrature, l’entendant chacun dans son sens, eût espéré y trouver la voie la plus sûre pour ses fins.

L’édit paraissait satisfaire les prétendues exigences de l’ordre public et les souvenirs de Louis XIV, dont le duc de Bourbon cherchait à s’armer ; il fut donc appuyé par le conseil administratif de l’État. Le parti jésuite ultramontain, qui alors relevait la tête, l’accueillit avec joie, par l’organe de l’archevêque de Tressan, comme une réorganisation complète de l’ancienne intolérance. La haute magistrature jansénienne y vit un moyen couvert et ingénieux d’enchaîner le sacerdoce aux tribunaux, qui se réservaient de le forcer à administrer les sacrements à tous les sujets du roi. Joly de Fleury prit plaisir plus tard à retourner ce dernier point de vue sous toutes les faces imaginables, et il trahit ainsi les véritables intentions des auteurs de cette loi dont les origines furent si compliquées. Mais jamais édit ne remplit moins son but. Cette arme