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des églises du désert.

toire de l’église (1699), livre qui fraya de nouvelles voies à la théologie raisonnable ; ce fut la fin du scepticisme et de la scolastique ; la science religieuse historique n’avait rien produit alors, et depuis elle n’a rien créé de plus sensé en critique, de plus fin quant aux aperçus, de plus agréable quant au style. Le flambeau de la science protestante française fut surtout relevé au xviiie siècle par le célèbre réfugié et pasteur à Berlin, de Beausobre, dont les livres sur des questions européennes ou orientales sont restés comme des modèles classiques de modération, d’impartialité et de savoir. Peu de temps avant Jacques Saurin, Basnage était mort (1723) ; les églises du désert avaient perdu un de leurs soutiens les plus considérés de l’Europe entière, y compris la cour de Versailles. Pierre Bayle, du Caria, pays de Foix, avait terminé sa vie, agitée par mille disputes, bien avant tous ses savants confrères d’exil et de science (1704) ; mais la réputation et la prodigieuse influence de son Dictionnaire et de ses idées n’avaient cessé de croître. Si cet esprit dangereux, admirable et subtil, voulut réellement établir la paix et appuyer la tolérance sur l’exposition de la vanité de tous les systèmes ; s’il voulut effectivement fonder un progrès stable sur des doutes passagers, ce dessein trop enveloppé ne fut point compris durant sa vie par les plus consciencieux de ses contemporains. Ils durent, au contraire consacrer leurs efforts à relever ces dogmes et ces croyances pour lesquels tant de Français avaient souffert, et qui ne trouvaient plus chez un de leurs anciens ministres que le plus impitoyable des railleurs. Jacques Saurin plaça tout le poids de son éloquence dans la thèse contraire. Il fut d’une manière spéciale l’antagoniste de Bayle. Pendant plus de vingt-