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histoire.

l’armement qu’à l’entretien desdites troupes. » Signé, Viala, pasteur et modérateur, et Olivier, secrétaire. On peut juger, d’après cette délibération, de la nature singulière des rapports qui s’étaient établis entre les églises et le gouvernement. Les protestants, d’un côté, persécutés, tourmentés de mille manières, demandaient en vain la liberté des prisonniers et galériens martyrs, fatiguant la cour de leurs inutiles requêtes ; de l’autre côté, ces mêmes protestants, mis en demeure de délibérer sur un armement militaire, constitués en assemblée de recrutement par ces mêmes magistrats qui leur refusaient l’existence civile : tel est le tableau vraiment inouï des mesures de cette époque de Louis XV. La cour jugeait que ces réformés, indignes de participer aux droits des autres citoyens, étaient dignes toutefois de former des bataillons pour la défense du trône. Il est d’ailleurs évident que les pasteurs, contraints d’introduire un si étrange objet dans leur acte synodal, voulurent concilier la prudence politique, avec les égards qu’ils se devaient à eux-mêmes et aux lois de leur discipline, en repoussant la demande des troupes, par une fin de non recevoir, tout en laissant les laïcs anciens prendre l’initiative sur une matière si opposée aux habitudes pastorales et aux coutumes évangéliques.

Nous allons, au surplus, faire connaître des moyens d’administration encore plus bizarres.

La cour hésitait entre l’obstinée poursuite de la politique, héritage de Louis XIV, tendant à tracasser les protestants par l’incertitude de leur état civil et à disperser leurs assemblées par la force et par les jugements, et entre la crainte de déterminer des soulèvements sérieux, et de les décider, en les poussant à