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des églises du désert.

tion de Louvois, qui gémissait, après la paix de Nimègue, de l’inaction de son département, et qui voulut occuper les régiments par ces promenades catholiques. Tous les jours le ministre répétait au roi : « Tant de gens se sont convertis, comme je l’avais dit à Votre Majesté, à la seule vue de ses troupes[1]. » On disait hautement à la cour que les cruautés commises auraient été punies par le monarque si elles fussent venues à sa connaissance[2]. Tant de soins et tant de rigueurs ne purent produire la chimérique unité de foi que l’on cherchait. On voulut des conversions, et pour une grande famille que l’on acheta par des charges ou que l’on effraya par des disgrâces, cent huguenots plus obscurs sortirent de France la haine dans le cœur. D’autres, toujours prêts à se soulever, restaient chez eux, sans avoir le courage de s’exiler, ni la lâcheté d’obéir à la force catholique ; la cour ne pouvait ignorer qu’un grand nombre de bons officiers français huguenots s’étaient engagés sur la flotte, que le prince d’Orange rassemblait, pour détrôner le dernier des Stuarts, ce roi que le peuple anglais regarda partir si froidement, et qui vint à Saint-Germain jouir de la noble hospitalité de Louis XIV, non sans traiter minutieusement les questions d’étiquette et chasser tous les jours, conduite qui lui attira de la bouche du père de Louvois, l’archevêque de Reims, cette remarque peu ecclésiastique : « Voilà un fort bon homme ; il a quitté trois royaumes pour une messe[3]. » Jacques II était obsédé de jésuites ; plus les Français le voyaient, moins ils le plaignaient

  1. Souv. de madame de Caylus.
  2. Mém. de la cour de France, 1688, 1689, par madame de La Fayette.
  3. Ibid.