Ce sont encore les statisticiens qui poussèrent un jour le cri d’alarme : La France se dépeuple, la France se meurt ! Entourée de voisines chaque jour grandissantes, sera-t-elle l’arbuste étouffé sous les arbres, qui n’a plus de sève et périt ? Et sous l’influence de ces préoccupations, journalistes d’écrire et législateurs d’emplir leurs cartons de projets. Les œuvres littéraires s’appellent Fécondité ou bien Maternité. Une commission extraparlementaire fonctionne depuis quelque trois ans dans l’ombre et le silence, d’où finira bien par naître quelque chose de grand. Alors la lutte contre les célibataires change de caractère et devient un simple épisode de la grande campagne. On ne leur reproche plus d’être une classe dissolue ; on ferme les yeux sur leurs plaisirs et leur luxe. Les préoccupations utilitaires dominent ; il faut frapper les célibataires comme complices de cette grande trahison, d’autant plus dangereuse qu’elle est presque inconsciente et que les individus n’en souffrent pas, qui prive la patrie de ses unités de combat, et qui, pour la guerre militaire ou pour la guerre économique, lui coûte chaque année le prix d’une défaite.
Pour forcer les grévistes des deux sexes à repeupler la France, entreprise qui devient le motif exclusif des attaques dirigées contre leur tranquillité, les réformateurs modernes n’ont trouvé qu’un moyen, et c’est bien sans doute le seul efficace, frapper la fortune. Le système est déjà résumé dans le projet de résolution sur la nomination d’une commission extraparlementaire de la dépopulation, déposé en 1900 par MM. Bernard, Piot, Wallon, etc.[1]. La justice en a été éloquemment défendue, à la tribune du Sénat, par MM. Bernard et Piot lors de la discussion sur
- ↑ J. Off. 1900. Doc. parl. Sénat, p. 695.