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En présence d’un aussi grave événement, M. Bruat agit à son retour avec la plus grande circonspection : il ne se dissimulait pas toute la portée et les conséquences de cette arrestation ; aussi essaya-t-il d’atténuer la mesure prise par M. d’Aubigny en faisant transférer Pritchard du blockhaus où il était, à bord du vaisseau français la Meurthe ; puis, profitant du départ du bâtiment anglais le Cormoran, il l’y fit embarquer, après avoir obtenu du capitaine que Pritchard ne serait débarqué sur aucune des îles de l’archipel de la Société. — Malgré ces précautions, cette arrestation eut un grand retentissement en Europe : ce fut un des faits importants de l’histoire extérieure du règne de Louis-Philippe.

Toutes les chancelleries européennes retentirent des protestations de Pritchard, qui, se donnant à tort le titre d’agent consulaire de S. M. B. à Tahiti (il ne l’était plus, comme nous l’avons vu plus haut ; il avait été changé et envoyé aux îles Samoa), dénonçait partout son arrestation comme arbitraire et illégale.

L’émotion fut si vive en Angleterre, qu’on crut à la possibilité d’une guerre, et le comte de Jarnac, notre ambassadeur à Londres, écrivait à ce sujet à M. Guizot, ministre des affaires étrangères :

« Les nouvelles de Tahiti ont produit en Angleterre la sensation la plus vive et la plus générale ; jamais, depuis mon arrivée à Londres, je n’ai vu un incident de la politique extérieure exciter une telle impression. Le parti religieux, si puissant en lui-même, si influent par ses affinités avec les sentiments les plus élevés comme avec les plus aveugles préjugés de ce pays-ci, s’est le premier ému. — Des