Page:Corancez - De J. J. Rousseau, 1798.djvu/18

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choſes inſignifiantes, & ma viſite fut courte. Je vis bien qu’il boudoit, & qu’il avoit quelque choſe ſur le cœur ; mais me rappelant notre convention, je trouvai qu’il y manquoit, & que c’étoit à lui de me parler, & non pas à moi de l’interroger. J’y retourne une ſeconde fois, même bouderie de ſa part, & même conduite de la mienne. Voulant cependant faire ceſſer un état de choſes aussi embaraſſant pour moi que pour lui-même, j’entre pour la troiſième fois, mais ayant bien pris mon parti, je ne dis mot en entrant, je m’aſſieds en ſilence, & ne profère pas une parole après m’être aſſis. Les mains lui trembloient. Enfin, ne pouvant plus y tenir, M. de Corancez, me dit-il,… Je vous demande pardon, lui dis-je en l’interrompant, vous me boudez depuis long-temps, & ce que vous avez ſur le cœur a eu le temps de fermenter ; rappelez-vous notre convention, vous avez manqué à votre parole, je vous tiendrai la mienne. J’ignore parfaitement ſur quelle matière & ſur quel fait je vais être interrogé. Je vous ai promis une ſolution prompte & préciſe, j’ai dit même qu’elle vous ſatiſferoit ; parlez, je ſuis prêts à vous répondre. Je ne puis peindre l’état dans lequel le mit ce préambule. Naturellement timide, & s’entendant reprocher ſon manque