Page:Corbière - Le Négrier.djvu/708

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conduisirent le soir la Rosalie jusque par le travers de Jujou, grand village situé à l’est, sur la large embouchure du fleuve : il me fallait à cette pose attendre la visite solennelle du Mafouc. Mes gens tendirent leurs hamacs sous les tentes dressées de l’avant à l’arrière, et bientôt, malgré les nuées de moustiques qui les déchiquetaient, ils s’endormirent paisiblement.

Je me promenai une partie de la nuit sur le pont, seul et livré à mes réflexions. Le feu des torches que les nègres allumaient dans leurs frêles cases de bambous voltigeait, à terre. L’air affaissé n’était troublé, dans le silence de la nuit, que par la voix des naturels, qui chantaient des chansons monotones et mélancoliques. Une brise faible et chaude