Page:Corbière - Les Amours jaunes, 1873.djvu/15

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— Non… c’est une drôlesse assez drôle, — de rue
Qui court encor, sitôt qu’elle se sent courue.

— Du chic pur ? — Eh qui me donnera des ficelles !
— Du haut vol ? Du haut-mal ? — Pas de râle, ni d’ailes !
— Chose à mettre à la porte ? — …Ou dans une maison
De tolérance. — Ou bien de correction ? — Mais non !

— Bon, ce n’est pas classique ? — À peine est-ce français !
— Amateur ? — Ai-je l’air d’un monsieur à succès ?
Est-ce vieux ? — Ça n’a pas quarante ans de service…
Est-ce jeune ? — Avec l’âge, on guérit de ce vice.

ÇA c’est naïvement une impudente pose ;
C’est, ou ce n’est pas çà : rien ou quelque chose…
— Un chef-d’œuvre ? — Il se peut : je n’en ai jamais fait.
— Mais, est-ce du huron, du Gagne, ou du Musset ?

— C’est du… mais j’ai mis là mon humble nom d’auteur,
Et mon enfant n’a pas même un titre menteur.
C’est un coup de raccroc, juste ou faux, par hasard…
L’Art ne me connaît pas. Je ne connais pas l’Art.


Préfecture de police, 20 mai 1873