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Page:Corday - La Vie amoureuse de Diderot.djvu/180

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La grande Catherine voulait que la simplicité régnât dans son palais de l’Ermitage. On a conservé l’original de l’inscription, écrite de sa main, qu’elle avait fait placarder sur toutes les portes intérieures : « Asseyé-vous si vous voulé et cela où il vous plaira, sans qu’on vous le répète cent fois ; la maîtresse de la maison n’aime pas les cérémonies ; que chacun soit donc ici comme chez soi. » Il est certain cependant que l’expansive bonhomie du philosophe la déconcerta. Bien qu’elle connût « le génie et ses étrangetés », elle avoue souvent sa surprise à ses correspondants. Elle écrit à Mme Geoffrin : « Votre Diderot est un homme bien extraordinaire ; je ne me tire pas de mes entretiens avec lui sans avoir les cuisses meurtries et toutes noires ; j’ai été obligée de mettre une table entre lui et moi pour me mettre, moi et mes membres, à l’abri de sa gesticulation. »

Elle goûtait plus ses vues philosophiques ou littéraires que ses plans de réforme politique. Elle jugeait qu’il manquait de sens pratique et le lui faisait entendre doucement. « Vous travaillez sur le papier… et moi sur la peau humaine. » Elle s’étonnait que tant de science et tant de rêverie pussent