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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/135

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Quant à l’e, nous en avons de trois sortes. L’e feminin, qui se rencontre tousiours, ou seul, ou en diphtongue, dans toutes les derniéres syllabes de nos mots qui ont la terminaison féminine, et qui fait si peu de son, que cette syllabe n’est jamais contée[1] à rien à la fin de nos vers féminins, qui en ont tousiours une plus que les autres. L’e masculin, qui se prononce comme dans la langue Latine, et un troisiéme e qui ne va jamais sans l’s, qui luy donne un son eslevé qui se prononce à bouche ouverte, en ces mots : succes, acces, expres. Or comme ce seroit une grande confusion, que ces trois e, en ces trois mots, aspres, verite, et apres, qui ont une prononciation si differente, eussent un caractére pareil, il est aisé d’y remédier, par ces trois sortes d’e que nous donne l’Imprimerie, e, é, è, qu’on peut nommer l’e simple, l’e

    a examen de plusieurs académiciens, dont la liste se trouve en tête du volume. Corneille y figure, toutefois on ne rencontre dans ce manuscrit aucune note de lui ; mais, dans son travail préparatoire, Mézeray avait rappelé en ces termes l’innovation introduite par l’illustre poëte : « Mr. de Corneille a proposé que pour faire connoistre quand l’S est muette dans les mots où qu’elle sifle, il seroit bon de mettre une S ronde aux endroits ot elle sifle, comme à chaste, triste, reste, et une s longue aux endroits où elle est muette, soit qu’elle fasse longue la voyelle qui la précéde, comme en tempefte, fefte, tefte, etc., soit qu’elle ne la fasse pas, comme en efcu, efpine, defdire, efpurer, etc. »
    « L’usage en seroit bon, objecte Segrais, mais linnovation en est dangereuse. »
    « Je n’y trouve point d’inconvenient, sur tout dans l’impression, réplique Doujat, et ce n’est plus une nouveauté puisque Mr. de Corneille l’a pratiqué depuis plus de dix ou douze ans. »
    « Où est l’inconuenient ? dit Bossuet ; ie le suiurois ainsi dans le dictionnaire et i’en ferois une remarque expresse où i’alleguerois l’exemple de Mr. Corneille. Les Hollandois ont bien introduit u et v pour u voyelle et u consone, et de mesme i sans queüe ou avec queüe. Personne ne s’en est formalisé ; peu a peu les yeux s’y accoustument et la main les suit. »

  1. Contée, comptée. Voyez le Lexique.