Scène IV.
Je n’en puis plus douter, mon feu désabusé[1]
Ne tient plus le parti de ce cœur déguisé.
Allons, ma chère sœur, allons à la vengeance ;
Allons de ses douceurs tirer quelque allégeance ;
Allons, et sans te mettre en peine de m’aider,
Ne prends aucun souci que de me regarder.
Pour en venir à bout, il suffit de ma rage ;
D’elle j’aurai la force ainsi que le courage ;
Et déjà dépouillant tout naturel humain,
Je laisse à ses transports à gouverner ma main.
Vois-tu comme suivant de si furieux guides
Elle cherche déjà les yeux de ces perfides,
Et comme de fureur tous mes sens animés
Menacent les appas qui les avoient charmés ?
Modère ces bouillons d’une âme colérée,
Ils sont trop violents pour être de durée ;
Pour faire quelque mal, c’est frapper de trop loin.
Réserve ton courroux tout entier au besoin ;
Sa plus forte chaleur se dissipe en paroles,
Ses résolutions en deviennent plus molles :
En lui donnant de l’air, son ardeur s’alentit.