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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/562

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LA VEUVE.
ALCIDON.

Ainsi ton feu se joue ?Ainsi quand je soupire,
Je la prends pour une autre, et lui dis mon martyre[1] ;
725Et sa réponse, au point que je puis souhaiter[2],
Dans cette illusion a droit de me flatter.

LA NOURRICE.

Elle t’aime ?

ALCIDON.

Elle t’aime ?Et de plus, un discours équivoque
Lui fait aisément croire un amour réciproque.
Elle se pense belle, et cette vanité
730L’assure imprudemment de ma captivité ;
Et comme si j’étois des amants ordinaires,
Elle prend sur mon cœur des droits imaginaires,
Cependant que le sien sent tout ce que je feins[3],
Et vit dans les langueurs dont à faux je me plains.

LA NOURRICE.

735Je te réponds que non. Si tu n’y mets remède,
Avant qu’il soit trois jours Florange la possède[4].

ALCIDON.

Et qui t’en a tant dit ?

LA NOURRICE.

Et qui t’en a tant dit ?Géron m’a tout conté ;
C’est lui qui sourdement a conduit ce traité[5].

ALCIDON.

C’est ce qu’en mots obscurs son adieu vouloit dire.

  1. Var. Je la prends pour un autre et lui dis mon martyre. (1634, 48, 52 et 57)
  2. Var. Et sa réponse, au point que je peux souhaiter. (1634)
  3. Var. Cependant que le sien ressent ce que je feins. (1634-57)
  4. Var. Paravant qu’il soit peu, Florange la possède. (1634-57)
  5. Var. [C’est lui qui sourdement a conduit ce traité.]
    alc. Ce n’est pas grand dommage : aussi bien tant de feintes
    M’alloient bientôt donner d’ennuyeuses contraintes.
    Ils peuvent achever quand ils trouveront bon :
    Rien ne les troublera du côté d’Alcidon.
    Cependant apprends-moi ce que fait ta maîtresse.
    la nourr. Elle met la nourrice au bout de sa finesse. (1634-57)