Aller au contenu

Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 10.djvu/265

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les douceurs de la paix, et la pleine abondance
Dont ses tranquilles soins comblent toute la France,
Suspendoient le courroux du plus grand de ses rois.
Ce courroux sûr de vaincre, et vainqueur tant de fois,
Vous l’aviez éprouvé, Flandre, Hainaut, Lorraine[1] ; 5
L’Espagne et sa lenteur n’en respiroient qu’à peine ;
Et ce triomphe heureux sur tant de nations
Sembloit mettre une borne aux grandes actions.
Mais une si facile et si prompte victoire
Pour le victorieux n’a point assez de gloire : 10
Amoureux des périls et du pénible honneur,
Il ne sauroit goûter ce rapide bonheur ;
Il ne sauroit tenir pour illustres conquêtes
Des murs qui trébuchoient sans écraser de têtes,
Des forts avant l’attaque entre ses mains remis, 15
Ni des peuples tremblants pour justes ennemis.

    Ludovico magno
    post expeditionem batavicam epinicium,
    [Auctore Carolo Ruæo, Societatis Jesu].

    Pacificus labor, et longæ comes aurea pacis
    Copia, victrices Lodoici mulserat iras :
    Mille triumphatæ suadebant otia gentes ;
    Et Lothari, et Belgæ, et frustra cunctator Iberus.
    Non tamen illa, licet geminum celebrata per orbem,
    Laudis inexpletum satiabat gloria pectus ;
    Jamque adeo facilis vilescunt præmia belli ;
    Victoremque piget quod Martem prævenit hostis
    Obsequio, quod præcipites in vincula turmæ,
    Totque suis ultro veniant cum civibus urbes.

  1. Voyez plus haut, p. 192-217, le poëme où Corneille célèbre la rapide conquête que Louis XIV fit de la Flandre en 1667. Le dernier mot du vers rappelle la campagne de 1670, qui dépouilla de ses États le duc de Lorraine.