Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 10.djvu/271

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le nautonier brutal et l’artisan sans cœur
Déjà de sa défaite osent se faire honneur : 100
Cette âme du parti, cet Amstredam[1], qu’on nomme
Le magasin du monde et l’émule de Rome,
Pour se flatter d’un sort à ce grand sort égal,
S’imagine à sa porte un second Annibal ;
S’y figure un Pyrrhus, un Jugurthe, un Persée ; 105
Et sur ces rois vaincus promenant sa pensée,
S’applique tous ces temps où les moindres bourgeois
Dans Rome avec mépris regardoient tous les rois :
Comme si son trafic et des armes vénales
Lui pouvoient faire un cœur et des forces égales. 110
Voyons, il en est temps, fameux républicains,
Nouveaux enfants de Mars, rivaux des vieux Romains,
Tyrans de tant de mers, voyons de quelle audace
Vous détachez du toit l’armet et la cuirasse,
Et rendez le tranchant à ces glaives rouillés 115
Que du sang espagnol vos pères ont souillés.

    Incaluere animis, operumque ignobile vulgus
    Perpetuum tanto sperat sibi nomen ab hoste.
    Imprimis rerum illa potens, validisque superba
    Classibus, et magnæ, si Dis placet, æmula Romæ
    Curia, prisca sequens latiæ vestigia laudis,
    Porsennam ad muros iterum, Pyrrhique elephantos,
    Annibalisque minas, et divitis agmina Persei,
    Tot regum clades, et tot fœcunda triumphis
    Sæcla putat spatiis iterum volvenda remensis :
    Demens, quæ Latii viresque animosque senatus
    Mercatu simulet turpi, et venalibus armis.
    Quin agite, Æneadis suppar genus, et nova Martis
    Progenies, belli ferratos rumpite postes,
    Tela focis rapite, et galeas ensesque parentum
    Induite, Austriacæ scabros rubigine cædis.

  1. Ce nom est écrit ainsi dans l’édition originale ; Amsterdam, dans celles du P. de la Rue et de Granet.