Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/368

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Scène V.

Médée, Nérine.


Médée.

Et bien ! Nérine, à quand, à quand cet hyménée ?
En ont-ils choisi l’heure ? en sais-tu la journée ?
N’en as-tu rien appris ? n’as-tu point vu Jason ?
N’appréhende-t-il rien après sa trahison ?
Croit-il qu’en cet affront je m’amuse à me plaindre ?
S’il cesse de m’aimer, qu’il commence à me craindre.
Il verra, le perfide, à quel comble d’horreur
De mes ressentiments peut monter la fureur.

Nérine.

Modérez les bouillons de cette violence,
Et laissez déguiser vos douleurs au silence.
Quoi ! madame, est-ce ainsi qu’il faut dissimuler ?
Et faut-il perdre ainsi des menaces en l’air ?
Les plus ardents transports d’une haine connue
Ne sont qu’autant d’éclairs avortés dans la nue,
Qu’autant d’avis à ceux que vous voulez punir,
Pour repousser vos coups, ou pour les prévenir.
Qui peut sans s’émouvoir supporter une offense,
Peut mieux prendre à son point le temps de sa vengeance ;
Et sa feinte douceur, sous un appas mortel,
Mène insensiblement sa victime à l’autel.

Médée.

Tu veux que je me taise et que je dissimule !
Nérine, porte ailleurs ce conseil ridicule :