Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/412

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Scène IV.

Ægée, en prison.

Demeure affreuse des coupables,
Lieux maudits, funeste séjour,
Dont jamais avant mon amour
Les sceptres n’ont été capables.
Redoublez puissamment votre mortel effroi,
Et joignez à mes maux une si vive atteinte,
Que mon âme chassée, ou s’enfuyant de crainte,
Dérobe à mes vainqueurs le supplice d’un roi.
Le triste bonheur où j’aspire !
Je ne veux que hâter ma mort,
Et n’accuse mon mauvais sort
Que de souffrir que je respire.
Puisqu’il me faut mourir, que je meure à mon choix ;
Le coup m’en sera doux, s’il est sans infamie :
Prendre l’ordre à mourir d’une main ennemie,
C’est mourir, pour un roi, beaucoup plus d’une fois.
Malheureux prince, on te méprise
Quand tu t’arrêtes à servir :
Si tu t’efforces de ravir,
Ta prison suit ton entreprise.
Ton amour qu’on dédaigne et ton vain attentat
D’un éternel affront vont souiller ta mémoire :