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ACTE V.


Scène première.

DON RODRIGUE, CHIMÈNE[1].
Chimène.

Quoi ! Rodrigue, en plein jour ! d’où te vient cette audace ?
Va, tu me perds d’honneur ; retire-toi, de grâce.

Don Rodrigue.

Je vais mourir, Madame, et vous viens en ce lieu,
Avant le coup mortel, dire un dernier adieu[2] :
Cet immuable amour qui sous vos lois m’engage[3]
N’ose accepter ma mort sans vous en faire hommage.

Chimène.

Tu vas mourir !

Don Rodrigue.

Tu vas mourir ! Je cours à ces heureux moments
Qui vont livrer ma vie à vos ressentiments.

Chimène.

Tu vas mourir ! Don Sanche est-il si redoutable
Qu’il donne l’épouvante à ce cœur indomptable ?
Qui t’a rendu si foible, ou qui le rend si fort ?
Rodrigue va combattre, et se croit déjà mort !

  1. Var. chimène, don rodrigue. (1638 P.)
  2. Var. Avant ce coup mortel, dire un dernier adieu. (1644 in-4o)
  3. Var. Mon amour vous le doit, et mon cœur qui soupire
    ---N’ose sans votre aveu sortir de votre empire.
    ---[chim. Tu vas mourir ! ] don rodr. J’y cours, et le Comte est vengé,
    ---Aussitôt que de vous j’en aurai le congé. (1637-56)