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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/220

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Eudoxe

Eût-elle démentice billet de Maurice ?
Et l’eût-elle pu faire, à moins que révéler
Ce que surtout alors il lui fallait celer ?
Quand Martian par là n’eût pas connu son père,
C’était vous hasarder sur la foi d’Exupère.
Elle en doutait, Seigneur, et, par l’événement,
Vous voyez que son zèle en doutait justement.
Sûre en soi des moyens de vous rendre l’empire,
Qu’à vous-même jamais elle n’a voulu dire,
Elle a sur Martian tourné le coup fatal
De l’épreuve d’un cœur qu’elle connaissait mal.
Seigneur, où seriez-vous sans ce nouveau service ?

Héraclius

Qu’importe qui des deux on destine au supplice ?
Qu’importe, Martian, vu ce que je te doi,
Qui trahisse mon sort, d’Exupère ou de moi ?
Si l’on ne me découvre, il faut que je m’expose ;
Et l’un et l’autre enfin ne sont que même chose,
Sinon qu’étant trahi je mourrais malheureux,
Et que, m’offrant pour toi, je mourrai généreux.

Eudoxe

Quoi ! pour désabuser une aveugle furie,
Rompre votre destin, et donner votre vie !

Héraclius

Vous êtes plus aveugle encore en votre amour.
Périra-t-il pour moi quand je lui dois le jour ?
Et lorsque sous mon nom il se livre à sa perte,
Tiendrai-je sous le sien ma fortune couverte ?
S’il s’agissait ici de le faire empereur,
Je pourrais lui laisser mon nom et son erreur ;