Je me retire donc, afin qu’en liberté
Les tendresses du sang pressent votre bonté ;
Et je ne veux plus voir, ni qu’en votre présence
Un prince que j’estime indignement m’offense,
Ni que je sois forcée à vous mettre en courroux
Contre un fils si vaillant et si digne de vous.
Scène III
Prusias. Nicomède, en deux mots, ce désordre me fâche.
Quoi qu’on t’ose imputer, je ne te crois point lâche :
Mais donnons quelque chose à Rome, qui se plaint,
Et tâchons d’assurer la reine, qui te craint.
J’ai tendresse pour toi, j’ai passion pour elle ;
Et je ne veux pas voir cette haine éternelle,
Ni que des sentiments que j’aime à voir durer
Ne règnent dans mon cœur que pour le déchirer.
J’y veux mettre d’accord l’amour et la nature,
Etre père et mari dans cette conjoncture…
Nicomède. Seigneur, voulez-vous bien vous en fier à moi ?
Ne soyez l’un ni l’autre.
Prusias. Et que dois-je être ?
Reprenez hautement ce noble caractère.
Un véritable roi n’est ni mari ni père ;
Il regarde son trône, et rien de plus. Régnez,
Rome vous craindra plus que vous ne la craignez.