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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 7.djvu/190

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ATTILA.

Scène V.

HONORIE, OCTAR.
HONORIE.

Tu le vois, pour toucher cet orgueilleux courage,
J’ai pleuré, j’ai prié, j’ai tout mis en usage,
Octar ; et pour tout fruit de tant d’abaissement,
Le barbare me traite encor plus fièrement.1700
S’il reste quelque espoir, c’est toi seul qu’il regarde.
Prendras-tu bien ton temps ? Tu commandes sa garde ;
La nuit et le sommeil vont tout mettre en ton choix ;
Et Flavie est le prix du salut de deux rois.

OCTAR.

Ah ! Madame, Attila, depuis votre menace,1705
Met hors de mon pouvoir l’effet de cette audace.
Ce défiant esprit n’agit plus maintenant,
Dans toutes ses fureurs, que par mon lieutenant :
C’est par lui qu’aux deux rois il fait ôter les armes,
Et deux mots en son âme ont jeté tant d’alarmes,1710
Qu’exprès à votre suite il m’attache aujourd’hui,
Pour m’ôter tout moyen de m’approcher de lui.
Pour peu que je vous quitte il y va de ma vie.
Et s’il peut découvrir que j’adore Flavie…

HONORIE.

Il le saura de moi, si tu ne veux agir,1715
Infâme, qui t’en peux excuser sans rougir :
Si tu veux vivre encor, va, cherche du courage.
Tu vois ce qu’à toute heure il immole à sa rage ;
Et ta vertu, qui craint de trop paroître au jour[1],
Attend, les bras croisés, qu’il t’immole à son tour.1720
Fais périr, ou péris ; préviens, lâche, ou succombe :

  1. L’édition originale porte un jour pour au jour.