Page:Corneille - Horace, 1641.djvu/21

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Enfin mon désespoir parmi ces longs obstacles,
M’a fait avoir recours à la voix des oracles.
Écoutez si celui qui me fut hier rendu
Eut droit de rassurer mon esprit éperdu.
Ce Grec si renommé, qui depuis tant d’années
Au pied de l’Aventin prédit nos destinées,
Lui qu’Apollon jamais n’a fait parler à faux,
Me promit par ces vers la fin de mes travaux :
Albe et Rome demain prendront une autre face ;
Tes vœux sont exaucés, elles auront la paix,
Et tu seras unie avec ton Curiace,
Sans qu’aucun mauvais sort t’en sépare jamais. "
Je pris sur cet oracle une entière assurance,
Et comme le succès passait mon espérance,
J’abandonnai mon âme à des ravissements
Qui passaient les transports des plus heureux amants.
Jugez de leur excès : je rencontrai Valère,
Et contre sa coutume, il ne put me déplaire,
Il me parla d’amour sans me donner d’ennui :
Je ne m’aperçus pas que je parlais à lui ;
Je ne lui pus montrer de mépris ni de glace :
Tout ce que je voyais me semblait Curiace ;
Tout ce qu’on me disait me parlait de ses feux ;
Tout ce que je disais l’assurait de mes vœux.
Le combat général aujourd’hui se hasarde ;
J’en sus hier la nouvelle, et je n’y pris pas garde :