Page:Corneille - Imitation de Jésus-Christ, édition 1862.djvu/54

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de loin, et de faire mes efforts pour rendre mon travail utile à mes lecteurs, sans aspirer à la gloire que le sien a méritée. Je ne prétends non plus à celle de donner mon suffrage parmi tant de savants, et me rendre partie en cette fameuse querelle touchant le véritable auteur d’un livre si saint. Que ce soit Jean Gersen, que ce soit Thomas a Kempis, ou quelque autre qu’on n’ait pas encore mis sur les rangs, tâchons de suivre ses instructions, puisqu’elles sont bonnes, sans examiner de quelle main elles viennent. C’est ce qu’il nous ordonne lui-même dans le cinquième chapitre de ce premier livre, et cela doit suffire à ceux qui ne cherchent qu’à devenir meilleurs par sa lecture : le reste n’est important qu’à la gloire des deux ordres qui le veulent chacun revêtir de leur habit. Je n’ai pas assez de suffisance pour pouvoir juger de leurs raisons, mais je trouve qu’ils ont raison l’un et l’autre de vouloir que l’église leur soit obligée d’un si grand trésor et si j’ose en dire mon opinion, j’estime que ce grand personnage a pris autant de peine à n’être pas connu, qu’ils en prennent à le faire connoître, et tiens fort vraisemblable qu’il n’eût pas osé nous donner ce beau précepte d’humilité dès le second chapitre : ama nesciri s’il ne l’eût pratiqué lui-même. Aussi ne puis-je dissimuler que je penserois aller contre l’intention de l’auteur que je traduis, si je portois ma curiosité dans ce qu’il nous a voulu et su cacher avec tant de soin. Ce m’est assez d’être assuré par la lecture de son livre que c’étoit un homme de Dieu, et bien illuminé du Saint-Esprit. J’y trouve certitude qu’il étoit prêtre ; j’y trouve grande apparence qu’il étoit moine ; mais j’y trouve aussi quelque répugnance à le croire italien. Les mots grossiers dont il