Page:Corneille - Marty-Laveaux 1910 tome 2.djvu/65

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Malgré tout cet orgueil qui n’y peut consentir.
Tu vois qu’un désespoir dessus mon front exprime
En mille traits de feu mon ardeur et ton crime ;
Mon visage t’accuse, et tu vois dans mes yeux
Un portrait que mon cœur conserve beaucoup mieux.
Tous mes soins, tu le sais, furent pour Célidée :
La nuit ne m’a jamais retracé d’autre idée,
Et tout ce que Paris a d’objets ravissants
N’a jamais ébranlé le moindre de mes sens.
Ton exemple à changer en vain me sollicite ;
Dans ta volage humeur j’adore ton mérite ;
Et mon amour, plus fort que mes ressentiments,
Conserve sa vigueur au milieu des tourments,
Reviens, mon cher souci, puisqu’après tes défenses
Mes plus vives ardeurs sont pour toi des offenses.
Vois comme je persiste à te désobéir,
Et par là, si tu peux, prends droit de me haïr.
Fol, je présume ainsi rappeler l’inhumaine,
Qui ne veut pas avoir de raisons à sa haine ?
Puisqu’elle a sur mon cœur un pouvoir absolu,
Il lui suffit de dire : "Ainsi je l’ai voulu."
Cruelle, tu le veux ! C’est donc ainsi qu’on traite
Les sincères ardeurs d’une amour si parfaite ?
Tu me veux donc trahir ? Tu le veux, et ta foi
N’est qu’un gage frivole à qui vit sous ta loi ?
Mais je veux l’endurer sans bruit, sans résistance ;
Tu verras ma langueur, et non mon inconstance ;
Et de peur de t’ôter un captif par ma mort,
J’attendrai ce bonheur de mon funeste sort.
Jusque-là mes douleurs, publiant ta victoire,
Sur mon front pâlissant élèveront ta gloire,