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ne crois pas être demeuré fort au-dessous de lui quand il a fallu me passer de son secours. * «
Rien de plus vrai : disciple de Lucain, en apparence, Cor- neille, en realité, partout et toujours, est son maître. Poète dramatique, il a un grand défaut et une grande qualité : son défaut, c'est d'incliner vers l'école de Sénèque et de Lucain, ces professeurs de rhétorique à la parole trop retentissante, c'est d'abuser, comme eux, des antithèses, des apostrophes, des prosopopées, c'est de s'enchanter de mots sonores et d'images éclatantes ; son mérite, c'est de ne jamais oublier qu'il écrit un drame, et de donner à tous ces morceaux à effet qu'il emprunte le mouvement, l'action, la vie. Il ne s'attar- dera point, par exemple, à nous raconter par quels procédés ingénieux Photin embaume et conserve la tête de Pompée, d'autant plus que la règle des vingt-quatre heures exigera que la mort de Pompée soit immédiatement suivie de l'arrivée de César ; s'il fait ensevelir Pompée par un de ses fidèles, il ne prêtera point à Cordus le long discours que Lucain lui prête. Au IX® chant de la Fharsale, Sextus Pompée fait à son frère Cneius un nouveau récit du crime; Corneille n'en pren- dra que quelques traits, et les fondra dans l'ensemble de son récit unique. De même, à quoi bon mettre dans la bouche de César une apostrophe indignée aux misérables qui lui présen- tent la tête de son rival? Le silence n'est-il pas plus éloquent et les actes qui suivront ne rendent-ils pas les paroles super- flues? César parlera pourtant, mais ce n'est pas un obscur assassin, c'est le vrai coupable, c'est le roi d'Egypte qu'il accablera de son mépris. Enfin la lettre de Photin à Achillas, au X* livre de Lucain, n'offre qu'un médiocre intérêt ; mais quelques vers y brillent, propres à mettre en relief le carac- tère de ce politique éhonLé, et Corneille saura les enchâsser habilement dans les deux scènes principales où Photin paraît au début du premier et du quatrième acte. Ainsi chez Cor- neille l'originalité créatrice n'exclut pas un art vraiment ingénieux d'utiliser et d'adapter ce que les autres ont créé.
Il est plus d'un passage sans doute où Corneille semble borner son ambition a reproduire Lucain ; qu'on se souvienne du discours de Photin, traduit et un peu délayé par Brébeuf :
Quand on se rend, dit-il, l'appui des misérables, La justice et le droit font souvent des coupables, Et qui veut relever ceux qu'abaissent les dieux Souvent sert de victime à ce zèle odieux;
I. BxameD de Médée.
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