Page:Corneille Théâtre Hémon tome3.djvu/494

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

148 RODOGUNE.

Réglez-vous là-dessus; et, sans plus me presser, iOïS

Voyez auquel des deux vous voulez ipnoncer.

(1 faut prendre parti, mon choix suivra le vôtre :

Je respecte autant l'un que je détesie l'aulre.

Mais ce que j'aime en vous du sang de ce grand roi,

S'il n'est digne de lui, n'est pas digne de moi. 4030

Ce sang que vous portez, ce trône qu'il vous laiï^se,

Valent bien que pour lui votre cœur s'intéresse.

Votre gloire le veut, l'amour vous le prescrit.

Qui peut contre elle et lui soulever votre esprit ?

Si vous leur préférez une mère cruelle, 4036

Soyez cruels, ingrats, parricides comme elle :

Vous devez la punir, si vous la condamnez;

Vous devez l'imiter, si vous la soutenez.

��fois, Rodoguno plaide; elle n'est convaincue qu'à demi. Chimène, elle aussi, demande avec passion, mais avec une passion raisonneuse et qu'on sent un peu artificielle, ce qu'elle espère ne jamais obtenir; si les situations sont très différentes, le langage est le même.

1025. Var. « Vous êtes l'un et l'autre, et, sani plus nie presser... »

(1647-56.)

1031. « On ne porte point un sang; il était aisé de dire : ce sang qui coule en vous, ou ce sang dont vous sortez. » (Voltaire.) M. Marty-Laveaux fait remarquer qu'il y a ellipse, et qu'il faut entendre : ce sang que vous portez en vous, qui coule en vos veines.

1032. Mais je sens que pour toi ma pitié s'intéresse.

{Cid, II, n.)

Je sens déjà mon cœur qui pour lui s'intéresse.

(Polyeucti; II, iv.) Mon cœur, mon lâche cœur s'intéresse pour lui.

(Racine, Andromarjiie , V, i.)

On dit plutol aiijuurd'hui .s'î/z/cj (■.<<«• à

1033. Gloiic, dans le sens d'honneur, de devoir, très usité chez Cor- neille, surtout quand il s'agit de la gloire des femmes ; Chimène parle à tout instant de sa gloire et Pauline y songi^ toujours. Il est vrai qu'ici c'est par un faux point d'honneur que Rodogunë essaye de stimuler le zèle des princes; mais les héroïne» de la Fronde (qui vivaient et intriguaient déjà) ont dû parler ainsi de la gloire à leurs amants avant de les précipiter dans les entreprises les plus périlleuses

1034. « Le sens est louche : conlvf elle signifie contre voire gl->irc, et lui signifie voire nmour; c'est là le sens, mais il faut le chercher. La clarté est la première lui du genre d'écrire; et puis comment l'esprit de ces princes peut-il être soulevé contre le ir gloire? est-ce parce qu'ils s'effrayent d'un parricide? • (Voltaire.) Les critiques grammaticales sont justes; l'appréciation littéraire est plus contestable peut-être : car Rodogunë se fait du devoir uno idée très étrangère ;i la nôtre; si elle en parle ici, si celte interrogation ressemble à un reproche, c'est que le silence épouvanté des deux princes lui est déjà une ré- ponse suffisante. — Qui peut, qu'est-ce qui peut; c'est le r/x/rf lafin.

1037. « Ri"n de tout cela ne paraît vrai : un fils n'est puiiii du tout obligé de punir sa mère, quoiqu'il condamne ses crimes; il doit encore moins l'imi- ter, quoiqu'il lui pardonne. » (Voltaire.) Toujours la même illusion vortueuse.

�� �