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228 NICOMÈDE

Métrobate l'a fait, par des terreurs paniques,

Feignant de lui trahir mes ordres tyranniques,

Kt pour l'assassiner se disant suborné,

11 l'a, grâces aux Dieux, doucement amené.

11 vient s'en plaindre au Roi, lui demander justice, 335

Et sa plainte le jette au bord du précipice.

Sans prendre aucun souci de m'en justifier,

Je saurai m'en servir à me fortifier.

Tantôt en le voyant j'ai fait de l'etfrayée,

J'ai changé de couleur, je me suis écriée; 340

11 a cru me surprendre, et l'a cru bien en vain.

Puisque son retour même est l'œuvre de ma main.

��Mais, quoi que Rome fasse, et qu'Attale prétende. Le moyen qu'à ses yeux Laodice se rende?

ARSINOÉ.

Et je n'engage aussi mon fils en cet amour 343

Qu'à dessein d'éblouir le Roi, Rome et la cour. Je n'en veux pas, Cléone, au sceptre d'Arménie :

331. <i Le mot ne ronvient guère quand on parle d'un homme comme Nico- mède. dont Arsinoé elle-même vante la bravoure; mais panique ici (iesitrne seu- lement une crainte mal fondée, dont l'objet est imaginaire. " M. Petit de Julie- ville.) Nous ne pensons pas que ce soit là le vrai sens, et nous ne voyons même pas comment on pourrait, logiquement, expliquer cette phrase en rapportant terreurs paniques à Nicomède, 11 parait évident, et d'après la construction de la phrasj et d'après le sens général, que c'est Métrobate qui a feint d'être pris d'une terreur panique en face de Nicoraède qu'il devait assassiner, et qui, dans cet ef- froi habilement simulé, a révélé le prétendu complot. — On a donné bien des étvmologies du moi panique ; \& plus simple est de s'en tenir à celle que donne M. Littre : tocv^xû;, de Dâv, le dieu Pan, qui troublait les esprits.

33:!. Délai traltir, de lui révéler; c'est le latin tradere alicui. Il y a donc là un latinisme, et non un barbarisme, comme le veut Voltaire. Lekain s'<st donné une peine bien inutile en corrigeant : « feignant de déceler •) ou : « lui laissant entrevoir. » Le vers est très français et très intelligible.

J'ai trnhi la jastice d l'amoar paternel. {Polyeucte, 111, 3.)

<( Elle eût pu trahir son secret atix princes et à Rodogune. et elle l'eût su plus tôt. >' (Examen de liodogiine.) M. Godefroy cite même un exemple curieux de Des- portes, qui dit. au jiropre : >• trahir la porte à... ■>

334. Var. Il me l'a. grâce aux Dieu.x. .loucement amené. (1651-56.)

338. A me fortifier, pour me fortiûer. voyez la note du v. 46.

339. u Les comédiens ont corrigé: j'ai feint d'être effrayée. » (Voltaire.) C'est en effet le texte que propose Lekain, et .\ndrieux l'a adopté. Xai fait de Veffruyee est plus dans le caractère du personnage et dans le ton du récit : c'est une comé- die qu'a jouée .\rsinoé. et elle la raconte comme elle l'a jouée.

343. Ici encore, prétei\dre est pris activement dans le sens de avoir des préten- tions à... Le sens n'est donc pas : quoi que dise .\ttale ; mais bien : quelles que soient ses prétentions.

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