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11 sait trop ménager ses vertus et ses vices.

11 était sous Néron de toutes ses délices;

Et la Lusitanie a vu ce même Othou

Gouverner en César et juger en Caton.

Tout favori dans Rome, et tout maître en province,

De lâche courtisan il s'y montra grand prince;

Et son àme, ployant, attendant l'avenir,

Sait faire également sa cour, et la tenir.

Sous un tel souverain nous sommes peu de chose;

Son soin jamais sur nous tout à fait ne repose :

Sa main seule départ ses libéralités ;

Son choix seul distribue Etats et dignités.

Du timon qu'il embrasse il se fait le seul guide,

Consulte et résout seul, écoute et seul décide,

Et quoique nos emplois puissent faire du bruit,

Sitôt qu'il nous veut perdre, un coup d'œil nous détruit.

Voyez d'ailleurs Galba, quel pouvoir il nous laisse, En quel poste sous lui nous a mis sa faiblesse. Nos ordres règlent tout, nous donnons, retranchons; Rien n'est exécuté dès que nous l'empêchons : Comme par un de nous il faut que tout s'obtienne, Nous voyons notre cour plus grosse que la sienne; Et notre indépendance irait au dernier point, Si l'heureux Vinius ne la partageait point : Notre unique chagrin est qu'il nous la dispute. L'âge met cependant Galba près de sa chute ; De peur qu'il nous entraîne, il faut un autre appui : Mais il le faut pour nous aussi faible que lui. Il nous en faut prendre un qui, satisfait des titres, Nous laisse du pouvoir les suprêmes arbitres. Pisou a l'àme simple et l'esprit abattu ; S'il a grande naissance, il a peu de vertu : Non de cette vertu qui déteste le crime; Sa probité sévère est digne qu'on l'estime ; Elle a tout ce qui fait uu grand homme de bien ; Mais en un souverain c'est peu de chose, ou rien. 11 faut de la prudence, il faut de la lumière, 11 faut de la vigueur adroite autant que tière, Qui pénètre, éblouisse, et sème des appas... 11 faut mille vertus enfin qu'il n'aura pas. Lui-même il nous priera d'avoir soin de l'Empire, En saura seulement ce qu'il nous plaira dire : Plus nous l'y tiendrons bas, plus il nous mettra haut, Et c'est là justement le maître qu'il nous faut.

MARTL\N.

Mais, Seigneur, sur le trône élever un tel homme, C'est mal servir l'Etat et faire opprobre à Rome.

LACUS.

Et qu'importe à tous deux de Rome et de l'État î

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