Page:Corréard, Savigny - Naufrage de la frégate La Méduse, 1821.djvu/165

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
163
CHAPITRE VII.

de huit jours. Nous disons que le commandant du brick n’avait pas reçu l’ordre positif de nous chercher ; voilà quelles étaient ses instructions. M. de Parnajon, commandant du brick l’Argus, se rendra sur la côte du désert, avec son bâtiment, emploîra tous les moyens pour donner des secours aux naufragés qui doivent avoir fait côte ; il leur fera passer les vivres et les munitions dont ils pourront avoir besoin. Après s’être assuré du sort de ces infortunés, il tâchera de continuer sa route jusqu’à la frégate la Méduse, pour s’assurer si les courans n’auraient point porté le radeau vers elle. » Voilà tout ce qui était dit de notre misérable machine, il est bien certain qu’à l’île Saint-Louis on ne comptait plus sur nous ; nos amis, depuis plusieurs jours, nous croyaient tous péris. Cela est si vrai, que quelques-uns d’eux, qui étaient à la veille de faire parvenir des lettres en Europe, annonçaient que cent-cinquante malheureux avaient été déposés sur un radeau, et qu’il était impossible qu’ils se fussent sauvés. Il ne sera peut-être pas déplacé de faire connaître une conversation qui eut lieu à notre sujet. Dans un cercle assez nombreux, quelques personnes dirent : Il est dommage qu’on ait abandonné ce radeau, il y avait dessus plusieurs brave garçons, mais leurs peines sont finies ; ils sont plus heureux que nous, car nous ne savons comment tout cela va se passer. Enfin notre rencontre fit décider de se diriger de nouveau sur le Sénégal, et le lendemain nous vîmes cette