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Page:Corréard, Savigny - Naufrage de la frégate La Méduse, 1821.djvu/178

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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

quarante lieues à peu près de l’île Saint-Louis. Le canot major et celui du Sénégal, qui s’étaient beaucoup rapprochés de la côte et qui n’avaient pu résister à la violence du gros temps, d’ailleurs dépourvus de vivres, avaient également été obligés de faire côte, dans la journée du 8, le premier à cinq heures du soir, et le second à onze heures du matin.

Écoutons encore M. Brédif.

Notre position ne changea pas jusqu’au 8 ; la soif nous tourmentait de plus en plus. L’officier me parla de faire la liste et d’appeler les personnes pour les rations d’eau ; tout le monde s’approchait et buvait ce qui lui était distribué. Je tenais mon registre au-dessous du gobelet de fer-blanc pour recevoir les gouttes qui tombaient et en humecter mes lèvres Quelques-uns essayèrent de boire de l’eau de mer ; je pense qu’ils ne faisaient que hâter le moment de leur destruction.

« Vers le milieu du 8 juillet, un de nos canots fit route avec la chaloupe. Il souffrait plus que nous, et résolut de faire de l’eau à terre, si cela était possible ; mais les marins révoltés exigèrent qu’on y débarquât tout à fait : il y avait deux jours qu’ils n’avaient bu. L’officier voulait s’y opposer ; les matelots avaient le sabre à la main. Une boucherie épouvantable fut sur le point d’avoir lieu à bord de ce malheureux canot. Les deux voiles furent hissées pour aller échouer plus promptement à la côte ; tout le monde arriva à terre ; le bateau s’emplit d’eau et fut abandonné.