Tels étaient nos discours, dont la voûte éthérée
Redit les nobles fictions,
Quand la Nef, aux vents consacrée,
Leur déroulait ses pavillons ;
Tels étaient les désirs que nous formions encore,
Alors qu’elle avait fui, pour chercher de l’Aurore
Les lumineuses régions.
Est-ce que la prière, ainsi qu’aux jours antiques,
Dans notre âge si criminel,
Perçant les célestes portiques,
Arrive encore à l’Éternel ?
Nos pleurs pour sa clémence ont-ils de nouveaux charmes
Et laisse-t-il toujours à nos cris, à nos larmes,
Fléchir son courroux solennel ?
Ô vaisseau, je te vois ! je découvre la proue
Qui trace un sillon écumant ;
Zéphyr en tes voiles se joue,
Et te balance mollement ;
Thétis autour de toi soupire avec tendresse,
Et de vagues d’azur t’enlace et te caresse,
Comme la vierge son amant.
Moins tranquille, aux détours d’une rive fleurie,
Voyage le cigne argenté,
Que les nymphes de la prairie
Suivent d’un œil de volupté :
Roi du canal paisible, où son orgueil se mire.
Lui-même il s’applaudit, et noblement admire
Et sa grâce et sa majesté.
Page:Corréard, Savigny - Naufrage de la frégate La Méduse, 1821.djvu/466
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