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SUR LA HOUILLÈRE DE BEAUJONC.

portent contre Goffin, qui, sans cesse, cherche à les calmer en les assurant qu’il les reconduira bientôt et leur donnera tout ce qu’ils demandent.

Goffin, au dernier terme du malheur, s’occupe encore avec une tendre sollicitude de ses compagnons d’infortune ; il les appelle tous par leurs noms, et il espère que ceux qui ne répondent pas sont parvenus à remonter au jour. Il parle surtout d’Antoine Hallet, qui, ayant saisi la chaîne fixée à la cloche placée au-dessus du bure, avait le premier donné l’alarme : il ignorait encore que ce mineur avait été victime de sa générosité. Etant d’une taille plus élevée que celle de ses camarades et espérant avoir assez de temps pour remonter, il avait cédé le pas à tous ceux qui pouvaient être submergés avant lui.

Cinq jours et autant de nuits se sont écoulés dans cette situation, dont le seul récit fait frémir : les malheureux, n’ayant aucune idée de la durée du temps, croient être au lundi, et nous sommes au mercredi suivant, tant il est vrai que si les momens sont longs en proportion de la douleur ou de l’inquiétude plus vive ou plus poignante que l’on éprouve, le temps passe avec rapidité en raison de la préoccupation de l’esprit.

Terminons enfin ce récit, qui nous oppresse ! hâtons-nous de délivrer des hommes qui nous inspirent tant d’intérêt.

Un passage est frayé sur une longueur de 47 mètres