Page:Correspondance inédite (1870-1875) d'Arthur Rimbaud, 1929.djvu/37

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Fort, ceint son vaste corps de la peau du lion,
S’avance, front terrible et doux, à l’horizon !

Par la lune d’été vaguement éclairée,
Debout, nue, et rêvant dans sa pâleur dorée
Que tache le flot lourd de ses longs cheveux bleus,
Dans la clairière sombre où la mousse s’étoile,
La Dryade regarde au ciel silencieux…
— La blanche Séléné laisse flotter son voile,
Craintive, sur les pieds du bel Endymion,
Et lui jette un baiser dans un pâle rayon…

— La Source pleure au loin dans une longue extase…
C’est la Nymphe qui rêve, un coude sur son vase,
Au beau jeune homme blanc que son onde a pressé.
— Une brise d’amour dans la nuit a passé,
Et, dans les bois sacrés, dans l’horreur des grands arbres,
Majestueusement debout, les sombres Marbres,
Les Dieux, au front desquels le Bouvreuil fait son nid,
— Les Dieux écoutent l’Homme et le Monde infini !

29 avril 1870

Arthur Rimbaud.

Si ces vers trouvaient place au Parnasse contemporain ?

— Ne sont-ils pas la foi des poètes ?

— Je ne suis pas connu ; qu’importe ? les poètes sont frères. Ces vers croient ; ils aiment ; ils espèrent : c’est tout.

— Cher maître, à moi : Levez-moi un peu : je suis jeune : tendez-moi la main...